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10
Jan

Prestation compensatoire, divorce et liquidation judiciaire

A propos d’un arrêt de la Cour de cassation du 20 octobre 2021, n° 20-10.710

Deux époux étaient mariés sous le régime de la séparation de biens.

Ils ont fait l’acquisition d’un immeuble en indivision.

Monsieur a été mis en liquidation judiciaire 21 ans après le mariage.

Mais 2 ans plus tard, le divorce de Monsieur et Madame a été prononcé, accordant à Madame une prestation compensatoire en capital de 95 000 € sous la forme de l’abandon par Monsieur de sa part indivise dans l’immeuble.

Il se trouve que le liquidateur, pourtant désigné près de 4 ans antérieurement à la procédure de divorce, n’était pas partie à l’instance.

Celui-ci a saisi le juge afin d’invoquer l’inopposabilité des dispositions patrimoniales prises dans le cadre de la procédure de divorce afin de protéger les créanciers de la procédure collective.

Le liquidateur a assigné l’épouse devant le tribunal de grande instance pour obtenir le partage de l’indivision ou préalablement la vente aux enchères de l’immeuble indivis, nonobstant les dispositions du jugement de divorce.

La Cour d’appel de Poitiers avait considéré que le transfert de propriété ordonné entre Monsieur et Madame à titre de prestation compensatoire par la décision de divorce devait être déclaré inopposable à la procédure collective.

L’épouse a contesté cet arrêt en saisissant la Cour de cassation.

Elle a prétendu que le dessaisissement du débiteur soumis à une procédure de liquidation judiciaire, en l’occurrence son ex-époux, ne devait concerner que l’administration et la disposition de ses biens, mais en aucun cas ne pouvait l’empêcher d’intenter seule une action en divorce ou y défendre une action qui est attachée à sa personne, à savoir la fixation d’une prestation compensatoire mise à sa charge.

A ses yeux, la Cour d’appel de Poitiers aurait violé les dispositions de l’article L 641-9 du Code de commerce.


La Cour de cassation suit totalement le raisonnement de l’épouse.

La Cour de cassation a estimé qu’il incombait au liquidateur de former tierce opposition au jugement de divorce pour faire déclarer inopposable à la liquidation judiciaire la disposition de ce jugement ayant décidé l’abandon à Madame de la part de Monsieur dans l’immeuble acquis par eux en indivision.

La tierce opposition est possible dans le délai de 30 ans du jugement définitif du divorce.

Le mandataire liquidateur devra démontrer que les modalités de règlement de la prestation compensatoire sont intervenues en violation des droits des créanciers.

Le mandataire liquidateur devra démontrer une intention de fraude s’il veut convaincre les juges du fond.

La chronologie des faits est également importante.

La liquidation judiciaire est intervenue près de 4 ans avant la décision ayant prononcé le divorce et fixé le montant de la prestation compensatoire et ses modalités.

Le mandataire liquidateur aurait pu agir avant que le juge de divorce ne se prononce sur les modalités de la prestation compensatoire.

Le jeu reste donc ouvert sur la suite que pourra donner la juridiction saisie de la tierce opposition.

Béatrice Bénichou- Médina – Notaire – Office Notarial Europole Presqu’île

Pour plus d’informations, vous pouvez la contacter beatrice.benichou-medina@notaires.fr

04.76.48.81.48

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