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17
Sep

Affaire du bijoutier de Nice : « illégitime défense » ?

Le 11 septembre 2013, Stephan TURK, bijoutier à Nice, se rend comme chaque matin dans ses locaux. Il désactive l’alarme, baisse la grille métallique à mi-hauteur derrière lui, et commence à sortir ses bijoux. C’est à ce moment qu’un homme armé s’introduit dans la bijouterie. S’ensuivront plusieurs minutes de violences envers Stephan TURK et de vol de bijoux. Le malfaiteur sortira et rejoindra un complice qui l’attendait dehors en scooter pour prendre la fuite. Stephan TURK saisi alors une arme derrière son comptoir, sorti dans la rue, s’agenouilla et tira en direction du scooter. L’un des deux hommes, touché dans le dos, succombera à ce coup de feu.

Cette affaire a créé l’émoi autour du bijoutier, entre pétition et lettres de soutien. Ses défenseurs crieront à la légitime défense.

Qu’en est-il en droit ?

L’article 122-5 du Code pénal énonce : « N’est pas pénalement responsable la personne qui, devant une atteinte injustifiée envers elle-même ou autrui, accomplit, dans le même temps, un acte commandé par la nécessité de la légitime défense d’elle-même ou d’autrui, sauf s’il y a disproportion entre les moyens de défense employés et la gravité de l’atteinte.

N’est pas pénalement responsable la personne qui, pour interrompre l’exécution d’un crime ou d’un délit contre un bien, accomplit un acte de défense, autre qu’un homicide volontaire, lorsque cet acte est strictement nécessaire au but poursuivi dès lors que les moyens employés sont proportionnés à la gravité de l’infraction ».

Il ressort de ce texte 2 conditions nécessaires pour que la légitime défense soit retenue : une atteinte justifiée accomplit dans le même temps et un moyen de défense proportionnée.

Stephan TURK était-il en état de légitime défense ?

La Cour d’assises des Alpes-Maritimes répond, à juste titre selon nous, que non, le bijoutier n’était pas en état de légitime défense. En effet, lorsque les malfaiteurs quittent les lieux, l’atteinte portée au bijoutier est finie. La riposte se situe donc a posteriori, et non « dans le même temps » comme le prescrit le Code pénal.

Ce texte est strictement appliqué par les Cours d’assises. L’exemple le plus retentissant de cette dernière décennie est certainement celui de Jacqueline SAUVAGE, qui a abattu son époux de 3 coups de fusil, ce dernier étant auteur de violences conjugales et soupçonné d’abus sexuel sur ses filles. La légitime défense, au moment des coups de feu, a été écartée.

Cette application stricte peut être considérée comme une injustice au regard des faits qui ont entrainé cette riposte.

Mais force est de constater que les jurés prennent en compte ces circonstances dans le prononcé de la peine. En effet, Stephan TURK sera condamné à 5 ans d’emprisonnement intégralement assorti du sursis pour violence ayant entrainé la mort sans intention de la donner. Bien que la légitime défense ne soit pas retenue, le bijoutier de Nice n’ira pas en prison.

Jacqueline SAUVAGE, pour sa part, sera condamnée, en première instance, puis un appel, à 10 ans de réclusion criminelle. Cependant, le Président Hollande accordera une grâce présidentielle partielle puis totale à Jacqueline SAUVAGE, suite au refus de la justice de faire droit à sa demande de libération conditionnelle.

Nous pouvons donc conclure que la défense légitime est certes en appréciation d’opportunité sur la sanction pénale mais qu’il existe une rigueur des principes face à une défense illégitime au regard du droit.

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