Actualités
Publications
Inscription à la newsletter
28
Nov

Rédaction des clauses de statuts de sociétés : attention à l’imprécision des termes employés

Dans un arrêt rendu par la 3ème chambre civile de la Cour de cassation le 14 juin 2018 n°16-28672, publié au Bulletin de la Cour de cassation, ce qui souligne son importance, la Haute Juridiction statue sur le cas d’un gérant de société qui avait outrepassé les pouvoirs que lui conféraient les statuts en résiliant le bail d’un locataire alors que lesdits statuts réservaient, ou semblaient en tout cas le faire, ce pouvoir à l’assemblée générale extraordinaire de la société.

En l’espèce, le locataire avait contesté la décision du gérant en invoquant les statuts. Et il obtint in fine gain de cause devant la Cour de Cassation.

Cette dernière énonce en effet que les tiers à un groupement foncier agricole peuvent se prévaloir des statuts du groupement pour invoquer le dépassement de pouvoir commis par le gérant de celui-ci ; qu’il en résulte que le tiers preneur à bail, pouvait se prévaloir des statuts du groupement bailleur pour justifier du dépassement de pouvoir commis par le gérant.

L’analyse de cet arrêt est intéressante pour les praticiens du droit des sociétés à plus d’un titre :

  • Il est précisé dans l’arrêt que les statuts en question étaient des statuts-type affectés de plusieurs erreurs de frappe ou de rédaction, en rendant la lecture floue ou insuffisamment sécurisée sur le plan juridique. L’emploi de statuts-type est fortement déconseillé dans la pratique des affaires : ils ne doivent le cas échéant servir que de base à l’élaboration d’un document adapté à la situation ou au projet d’entreprise envisagé par les associés.
  • Cet arrêt attire l’attention sur le danger que représente la clause limitative de pouvoirs du gérant puisque, mal appliquée, elle peut motiver une demande de nullité du ou des actes accomplis par le gérant en violation de ladite clause.
  • La rédaction d’une telle clause doit donc être soignée : pour éviter qu’elle ne soit invoquée par des tiers au détriment de la société, il peut être utile de préciser que la limitation de pouvoirs ne vaut qu’à titre de règlement interne entre les associés, comme les praticiens le mentionnent souvent ; dans ce cas seuls les associés peuvent reprocher et agir contre le dépassement de pouvoirs du gérant sans exposer la société à une demande d’annulation par un tiers.

Enfin, on ne peut s’empêcher de penser, dans le cas d’espèce étudié ci-avant, qu’il aurait suffi au gérant de convoquer une assemblée générale extraordinaire pour se faire autoriser à résilier le bail, afin de couvrir l’éventuelle difficulté d’interprétation de la clause imprécise de limitation de ses pouvoirs des statuts, économisant ainsi quelques années de procédure judiciaire… Le formalisme est souvent protecteur, et en droit des sociétés, il ne faut donc pas hésiter à convoquer une assemblée générale pour faire autoriser par les associés la réalisation d’une opération susceptible de générer la moindre contestation de quiconque !

Comments ( 0 )