Dans cette affaire, la société FREE MOBILE a saisi le Tribunal Administratif d’Amiens d’une demande de suspension d’un arrêté par lequel la Collectivité a refusé de lui délivrer un permis de construire pour l’édification d’une antenne relais sur le territoire communal.
Le juge des référés a tout d’abord rappelé que la suspension d’une décision administrative au titre de l’article L.521-1 du Code de justice administrative suppose la démonstration d’une urgence caractérisée, c’est-à-dire une atteinte suffisamment grave et immédiate à un intérêt public ou aux intérêts du requérant.
En matière d’installation d’antennes relais, le juge administratif, saisi dans le cadre d’un référé-suspension, admet très fréquemment la condition d’urgence, estimant qu’elle est remplie au regard des enjeux liés au déploiement des réseaux. Il apparaît même que les juridictions administratives ont, de manière récurrente, tendance à considérer cette urgence comme étant en quelque sorte présumée.
Or, cette ordonnance est particulièrement intéressante puisque le juge administratif a retenu que l’urgence n’avait pas été démontré par la société pétitionnaire en considérant que :
4. En premier lieu, un intérêt public s’attache à la couverture du territoire national par les réseaux de téléphonie mobile, notamment au moyen de la norme 5G. En particulier, la société Free Mobile a pris à ce titre des engagements de couverture du territoire envers l’Etat et a été autorisée, par une décision n° 2020-1255 du 12 novembre 2020 de l’Autorité de régulation des communications électroniques, des postes et de la distribution de la presse (ARCEP) à utiliser des fréquences dans la bande 3,4 – 3,8 gigahertz pour établir et exploiter un réseau radioélectrique mobile ouvert.
5. La carte de couverture de la commune de Château-Thierry suivant la norme 5G, disponible sur le site de l’opérateur, fait état d’une couverture importante qui ne saurait être regardée comme partielle, puisque l’absence de desserte auquel le projet permettra de remédier ne concerne qu’une zone située à l’ouest, de caractère essentiellement agricole et boisé pratiquement dépourvue d’habitations et particulièrement restreinte eu égard à la surface de la commune, ainsi qu’une zone située à l’est, qui ne concerne qu’une portion limitée d’une voie départementale et quelques habitations. La requérante ne conteste pas de manière suffisamment probante les données de l’ARCEP selon lesquelles trois antennes qu’elle exploite sur le territoire couvert et qui émettent notamment en 5G sur une fréquence de 3,5 gigahertz, ainsi comprise dans la bande 3,4 – 3,8 gigahertz, apportent une desserte effective de celui-ci. Dans ces circonstances, et alors qu’il ressort des pièces du dossier que l’ensemble du territoire concerné par l’installation projetée bénéficie déjà des services en norme 4G/ 4G+ dans des conditions satisfaisantes, la société requérante ne justifie pas que le refus opposé au projet en cause porte une atteinte suffisamment grave et immédiate à l’intérêt public.
Enfin, le juge administratif a estimé que, nonobstant le fait que la société n’ait pas encore atteint l’objectif de déploiement fixé par l’État, elle ne démontrait pas que le refus opposé au projet en litige portait une atteinte suffisamment grave et immédiate à ses intérêts propres.
Cette ordonnance semble donc être le début d’un tournant dans ce contentieux, de plus en plus important, pour les sociétés de téléphonie mobile.
Référence : Tribunal Administratif d’Amiens, 6 juin 2025, n°2501353