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10
Mai

Bail commercial et travaux prescrits par l’Administration (commerces de restauration)

(Cour de Cassation, 3ème chambre civile, 28 janvier 2021, n° 20-13.854)

A qui incombe la charge de travaux prescrits par l’Administration ?

Cette question est rituelle dans les rapports entre locataires et propriétaires.

L’arrêt commenté concerne un commerce de restauration, mais la solution est identique pour tous les types de commerce.

Il est vrai qu’en matière de restauration ou d’hôtellerie, les normes et contraintes administratives sont nombreuses.

Comme toujours dans ce type de situation, il faut d’abord se référer aux clauses contenues dans le bail commercial et procéder à une lecture attentive.

Tout transfert de charges au préjudice du locataire doit être express.

Il s’agit d’une règle fondamentale en cette matière.

Le fondement juridique pour traiter la question relève de l’article 1719 du Code Civil.

Le bailleur est obligé par la nature du contrat et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière :

– de délivrer au preneur la chose louée

– d’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée

Cela veut dire que le Code Civil met à la charge du bailleur l’obligation de délivrer à son locataire un local en état de servir à l’usage pour lequel il a été loué, c’est-à-dire conforme à la destination prévue au bail.

Cette disposition n’est pas d’ordre public.

Il est possible d’insérer une clause de transfert de charges au locataire.

Dans l’espèce évoquée par la Cour de cassation dans son arrêt du 28 janvier 2021 sur pourvoi d’un arrêt de la Cour d’Appel de Nouméa en date du 2 décembre 2019, le bail contenait deux dispositions.

L’une prévoyait que « pour la pratique de son activité, l’exploitant s’oblige expressément à s’assurer que son activité se déroule en conformité rigoureuse avec les prescriptions légales, administratives, réglementaires ou autres pouvant s’y rapporter. »

De même, « l’exploitant devait faire son affaire personnelle de l’obtention dans les conditions réglementaires de toutes les autorisations administratives requises par la règlementation en vigueur en fonction de l’utilisation projetée des locaux, l’exploitant devait se conformer aux lois et règlements en vigueur concernant la voirie, la salubrité, la police, la sécurité, l’hygiène et le travail de façon à ce que la SCI propriétaire ne puisse être ni inquiétée, ni recherchée. »

La Cour d’Appel de Nouméa, dans son arrêt attaqué, a considéré que les clauses du bail exonéraient le bailleur de la charge financière de la réalisation des travaux prévus par les prescriptions générales de sécurité.

La Cour de cassation a très justement cassé l’arrêt.

La Cour de cassation a considéré que la clause prévoyant que l’exploitant, donc le locataire, devait se conformer aux lois et règlements en vigueur concernant notamment la sécurité, de façon à ce que le bailleur ne puisse être ni inquiété, ni recherché à ce sujet, ne pouvait en aucun cas signifier que les travaux prescrits par l’autorité administrative étaient à sa charge.

Le fait que le locataire doive se conformer aux lois et règlements n’implique pas qu’il assume la charge des travaux prescrits par l’Administration.

Seule une clause précise et expresse pouvait transférer cette charge au locataire par une disposition contraire aux préconisations de l’article 1719 du Code civil qui n’est pas d’ordre public.

Cette solution est logique.

Il convient de bien rédiger les clauses de transfert de charges au préjudice du locataire.

Il est tout à fait possible de prévoir contractuellement les dispositions contraires à l’article 1719 du Code civil au préjudice du locataire, mais encore faut-il les rédiger avec soin et de manière expresse.

Jean-Luc Médina – Avocat associé

Pour plus d’informations, vous pouvez le contacter jl.medina@cdmf-avocats.com – 04.76.48.89.89

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