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Juil

BAIL COMMERCIAL  ET CONDITIONS DE VALIDITE D’UNE CESSION DE DROIT AU BAIL

(Cour de cassation, 3ème chambre civile, 21 avril 2022, n° 21-11.404)

La clause autorisant une cession de droit au bail sous réserve du consentement préalable et par écrit du bailleur est généralement insérée dans les baux commerciaux.

La Cour de cassation a eu à connaître d’une affaire où une succession de cession d’immeuble est intervenue, alors que parallèlement l’immeuble contenait un droit au bail qui a lui-même été cédé.

Les formalités de consentement préalable et par écrit du bailleur de la cession du droit au bail n’avaient pas été respectées.

De même, ce bailleur n’avait pas respecté le droit de préférence prévu à l’article L 145-46-1 du Code de commerce qui est d’ordre public.

C’est donc le locataire, bénéficiaire d’une cession de droit au bail irrégulière qui a pris l’initiative d’assigner le bailleur en non-respect de son droit de préférence.

Le locataire, bénéficiaire du droit au bail sans respect du consentement préalable et écrit du bailleur peut-il engager une action judiciaire en non-respect du droit de préférence dont il aurait dû bénéficier ?

La Cour d’appel de Douai avait déduit que dès lors que le bailleur avait perçu des loyers du locataire postérieurement à la date de renouvellement du bail et lui avait réclamé une régularisation des charges, il avait nécessairement acquiescé à la cession du droit au bail.

La Cour d’appel a également déduit que le bailleur avait aussi adressé des appels de loyers et provisions pour charges au locataire, de sorte qu’il fallait considérer que l’acquiescement était intervenu tacitement.

La Cour de cassation ne suit pas cette motivation et casse l’arrêt de la Cour d’appel de Douai.

Elle considère que les motifs adoptés par la Cour d’appel de Douai sont impropres à caractériser l’accord du bailleur à la cession du droit au bail et la connaissance par le bailleur de l’identité réelle du preneur.

Cette décision peut surprendre.

La Cour d’appel de Douai a en effet bien remarqué qu’en encaissant des loyers et en faisant des appels de provisions de loyers et charges, il y avait une reconnaissance tacite du nouveau locataire.

La Cour de cassation considère que ces éléments-là ne viennent pas suppléer la nécessaire acceptation du nouveau locataire, puisque la clause du bail prévoit très clairement et de manière expresse un nécessaire consentement préalable et écrit du bailleur.

L’acquiescement du bailleur à la cession du droit au bail suppose des actes manifestant sans équivoque sa reconnaissance du cessionnaire comme son locataire et ne peut résulter d’appels de loyers dont le destinataire ne peut être précisément identifié.

En l’occurrence, le bailleur avait adressé ses appels de loyers à une dénomination sociale qui était une enseigne et non pas une société régulièrement répertoriée en précisant le numéro de son extrait k-bis.

En tout état de cause, dans ce cas d’espèce, l’immeuble avait fait l’objet de différents transferts de propriété, de sorte que la Cour de cassation a considéré que les actes implicites par lesquels le bailleur avait pu acquiescer à la cession du droit au bail intervenue irrégulièrement en méconnaissance de la clause du bail étaient inopposables à l’acquéreur des locaux qui ne pouvait se les voir opposer par le cessionnaire.

Il est donc important, en tout état de cause, de respecter le formalisme tel qu’il est édicté par le bail.

Cet arrêt n’est pas un arrêt de principe, car d’autres faits d’espèce pourraient conduire les juges du fond à considérer qu’il y a bien eu un acquiescement implicite.

Cependant, par précaution, il faut privilégier le strict respect des termes du bail commercial.

Jean-Luc Médina – Avocat associé
Pour plus d’informations, vous pouvez le contacter jl.medina@cdmf-avocats.com – 04.76.48.89.89

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