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02
Mai

OCTROI EXCESSIF DE CREDITS : UN EMPRUNTEUR PROFESSIONNEL N’EST PAS FORCÉMENT UN EMPRUNTEUR AVERTI…

OCTROI DE CRÉDIT EXCESSIF : AVERTI OU/ET PROFANE ?

Nous connaissions les arrêts de la 1ère Chambre Civile de la Cour de Cassation en date du 12 juillet 2005 sur les obligation du banquier en matière d’octroi de crédits, opérant une distinction entre l’emprunteur averti et l’emprunteur profane.Le statut de l’emprunteur profane lui confère une véritable protection . le banquier doit vérifier ses capacités financières et éviter de lui accorder un prêt excessif au regard de ses facultés contributives. A défaut le banquier manque à son devoir de mise en garde.A l’égard de l’emprunteur averti, la 1ère Chambre Civile, suivant le raisonnement de la Chambre Commerciale, posait le principe de la responsabilité de l’établissement bancaire à une double condition, que l’établissement bancaire ait disposé d’informations sur la fragilité de la situation financière de l’emprunteur et que ce dernier quant à lui ait ignoré ces informations. On était en présence d’un comportement dolosif du banquier.Par trois arrêts en date du 3 mai 2006 (n°04-15.517;02-11.211;04-19.319), la Chambre Commerciale de la Cour de Cassation s’est également prononcée sur le régime de la responsabilité de la Banque envers l’emprunteur ou la caution au titre de l’octroi d’un crédit.

Elle a  a dans un premier temps implicitement fait référence au clivage averti / profane s’alignant explicitement quelques semaines plus tard sur la dichotomie introduite par la 1ère Chambre Civile (Cass com 20.06.2006 n°04-14.114).
Le devoir de mise en garde s’est donc substitué peu à peu dans le langage jurisprudentiel aux devoirs d’information ou de renseignement du banquier.
Poursuivant sa construction jurisprudentielle, par un arrêt du 21 février 2006 (n°02-19.066), la 1ère Chambre Civile a renforcé le principe de mise en garde du prêteur envers l’emprunteur profane, mais de façon assez curieuse elle a semblait admettre qu’ une banque puisse accorder un crédit excessif  à la condition de mettre très clairement en garde son client contre les conséquences très risquées de la probable incapacité de remboursement. Corrigeant cette impression, par un arrêt du 26 septembre 2006 (n°04-20.508), elle a ,bien au contraire posé pour principe que le devoir de mise en garde n’était pas seulement une obligation d’avertir mais le devoir de refuser de « surendetter » le consommateur au delà du raisonnable.
Alors que cette Jurisprudence semblait enfin posée, deux nouveaux arrêts d’une Chambre Mixte en date du 29 juin 2007 remettent en cause semble t-il la clarté des solutions posées  tant par la Chambre Civile que Chambre Commerciale de la Cour de Cassation.
Dans un le premier des deux arrêts, un agriculteur qui avait souscrit auprès de sa banque une quinzaine de prêts, dont les échéances sont demeurées impayées, avait assigné en responsabilité l’établissement bancaire.
La Chambre Mixte de la Cour de Cassation (n°05-21.104) a cassé l’arrêt de la Cour d’Appel car celle-ci n’avait pas précisé si l’agriculteur était un emprunteur non averti et dans ce cas, si conformément au devoir de mise en garde auquel la banque était tenue, elle justifiait avoir satisfait à son obligation à raison des capacités financières de l’emprunteur.
Il apparaît donc que la qualité d’emprunteur averti doit être dissociée de la qualité d’emprunteur professionnel. En d’autres termes un emprunteur ne bénéficiant pas de la qualité de consommateur pourrait être considéré comme un emprunteur non averti ou profane. Mais cet arrêt de  chambre mixte pose également pour principe que l’étendue dudevoir de mise en garde dépend des capacités financières de l’emprunteur et des risques d’endettement né de l’octroi des prêts. Il ne suffit plus de mettre en garde, il faut refuser.
Il ne reste plus qu’à attendre de nouveaux arrêts de la Cour de Cassation, afin que ces notions soient encore affinées, la solution dégagée par le Chambre Mixte de la Cour de Cassation mériterait encore quelques éclaircissements dans un contexte ou le droit du crédit demeure d’actualité.
Michel DALMAS  et Jean-Luc MEDINA