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17
Nov

SPIC ET COMPETENCE

Un litige d’eau… et de compétence :

Par une décision du 6 octobre 2025, le Tribunal des conflits a tranché une nouvelle fois la question, récurrente, de la délimitation entre le juge administratif et le juge judiciaire en matière de services publics industriels et commerciaux (SPIC).

L’affaire concernait l’Association syndicale libre (ASL) du passage du Caire, qui regroupe les propriétaires d’immeubles riverains d’une voie privée ouverte à la circulation piétonne à Paris.

À la suite de désordres affectant les canalisations d’eau potable situées sous cette voie, l’ASL avait demandé à Eau de Paris, établissement public industriel et commercial, de prendre en charge des travaux d’entretien et de réparation du réseau.

Face au refus implicite opposé par la régie, l’association avait saisi le juge administratif, estimant que les travaux en cause relevaient du régime des travaux publics.

La cour administrative d’appel de Paris, saisie de l’appel contre le jugement d’incompétence du tribunal administratif, a préféré renvoyer la question au Tribunal des conflits, sur le fondement de l’article 35 du décret du 27 février 2015, afin qu’il précise quel ordre de juridiction est compétent : le juge administratif, en raison de la nature publique des travaux sollicités, ou le juge judiciaire, en raison du caractère industriel et commercial du service en cause ?

Le Tribunal des conflits adopte une position claire :

« eu égard aux rapports de droit privé qui lient le service public industriel et commercial de l’eau à ses usagers, les litiges relatifs aux rapports entre ce service et ses usagers relèvent de la compétence de la juridiction judiciaire. Ainsi, il n’appartient qu’à la juridiction judiciaire de connaître des litiges relatifs aux demandes adressées par des usagers au gestionnaire du service, tendant à la réalisation de travaux d’entretien et de réfection du réseau de transport et de distribution d’eau en vue de prévenir la survenance de dommages susceptibles de leur être causés à l’occasion de la fourniture du service, quand bien même de tels travaux pourraient avoir la nature de travaux publics. »

L’ASL qui regroupe, en « vue d’administrer le passage, les propriétaires des immeubles riverains, eux-mêmes desservis en eau potable par les réseaux en litige, doit être regardée comme agissant en qualité d’usager du service public de l’eau. » Dès lors, le litige relève de la compétence du juge judiciaire.

Cette décision du 6 octobre 2025 ne constitue pas un revirement de la jurisprudence Malroy (TC, 8 octobre 2018, Commune de Malroy, n° 4135) : le juge administratif conserve sa compétence résiduelle pour les litiges relatifs au raccordement initial au réseau public. Elle clarifie simplement que, lorsque les travaux interviennent dans le cadre de la fourniture du service, la compétence revient au juge judiciaire, précisant ainsi la répartition entre les deux juridictions.

Référence : Tribunal des conflits, 6 octobre 2025, Association syndicale libre du passage du Caire c/ Eau de Paris, n° C4351

14
Nov

Le sous-traitant a une obligation de résultat

La Cour de cassation vient rappeler que le sous-traitant est tenu, à l’égard de l’entreprise principale, d’une obligation de résultats.

Cette obligation de résultat emporte présomption de faute et de causalité dont le sous-traitant ne peut s’exonérer totalement ou partiellement qu’en démontrant l’existence d’une cause étrangère.

Référence : Cass, Civ, 3ème, 9 octobre 2025, n° 23-23.924

12
Nov

Devoir d’information et de conseil du notaire

L’explication doit être précise et concrète !

Dans un arrêt du 17 septembre 2025, la première chambre civile de la Cour de cassation a confirmé l’arrêt de la Cour d’appel qui avait retenu que la responsabilité civile professionnelle des notaires rédacteurs de l’acte d’achat d’un terrain à bâtir était bien engagée vis-à-vis des acquéreurs.

En effet, le compromis ne mentionnait aucun projet d’édification de logements sociaux à proximité de la parcelle acquise. En premier lieu, le projet d’acte communiqué aux candidats, s’il comportait la mention d’un certificat d’urbanisme selon lequel une note de renseignements d’urbanisme en date du 18 juillet 2014 avait été délivrée par la Commune ne comportait pas la note alors qu’elle était en possession des notaires. Surtout, les notaires n’en ont pas expliqué la teneur dans le projet d’acte puis dans l’acte de vente, en se contentant de procéder à un renvoi à une pièce annexée à l’acte sans qu’aucune explication précise n’ait été fournie aux acquéreurs sur les conséquences de cette note.

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10
Nov

L’inconstitutionnalité des règles de « CDISATION » des agents contractuels relevant de la fonction publique d’état

Par une décision du 30 juillet 2025, le Conseil constitutionnel, saisi dans le cadre d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) dirigée à l’encontre des dispositions de l’article L. 332-4 du Code général de la fonction publique (CGFP), a estimé que les périodes de travail accomplies par un agent recruté pour faire face à la vacance temporaire d’un emploi, devaient désormais être décomptées dans les six années nécessaires pour ouvrir droit à la conclusion d’un CDI, en jugeant inconstitutionnelles les dispositions qui les excluaient jusqu’alors.

En l’espèce, la requérante reprochait à l’article L. 332-4 du CGFP d’exclure de la comptabilisation des six années de services publics permettant l’obtention d’un CDI, les périodes de travail accomplies pour faire face à une vacance temporaire d’emploi (en application de l’article L. 332-7).

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07
Nov

Communication des motifs d’une décision implicite de rejet et délai de recours contentieux : clarification par le Conseil d’état

Saisi par la Cour Administrative d’Appel de PARIS, le Conseil d’État précise l’articulation entre la demande de communication des motifs et le délai de recours contentieux contre les décisions implicites de rejet.

Les apports essentiels :

Jusqu’alors, conformément à la décision Testa (CE, 29 mars 1985) le silence gardé par l’administration sur une demande de communication des motifs faisait obstacle au déclenchement du délai de recours contentieux.

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05
Nov

Passation de concession : Le Conseil d’Etat reconnait la possible régularisation des offres par l’autorité concédante durant la phase de négociation.

Dans cette affaire, un contrat de gestion a été conclu entre la communauté d’agglomération PROVENCE ALPES AGGLOMERATION et l’Association GESTION DU CINEMATOGRAPHE, portant sur l’exploitation, par cette dernière, d’un complexe cinématographique. La société CINE ESPACE EVASION, seule autre candidate à l’obtention de ce contrat de concession, a vu son offre rejetée.

C’est dans ce contexte que cette dernière a saisi le Tribunal Administratif de Marseille d’une demande tendant à l’annulation du contrat. Elle dénonçait ici une éviction irrégulière, estimant que, si son offre ne comportait aucune irrégularité, tel n’était pas le cas de celle de sa concurrente, dont l’offre initiale était irrégulière. Dès lors, la société estimait qu’un soumissionnaire choisi ne pouvait pas négocier avec l’autorité concédante, dans le cas où son offre était empreinte d’irrégularité.

Si le Tribunal Administratif lui donne raison, la Cour Administrative d’Appel de Marseille va, quant à elle, annuler le jugement de première instance, conduisant ainsi la société à se pourvoir en cassation. Dans cette affaire, le Conseil d’Etat devait répondre à la question suivante : le candidat à une concession, ayant remis une offre initialement irrégulière, peut-il se voir admis à la négociation et, le cas échéant, obtenir la conclusion du contrat de concession ?

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03
Nov

Division d’un fonds et désenclavement

La Cour de cassation, dans son arrêt du 2 octobre 2025, vient rappeler que la détermination de l’assiette d’un passage par trente ans d’usage continu rend inapplicables les dispositions de l’article 684 du Code civil, de sorte que, si l’état d’enclave d’un fonds résulte d’une division, l’assiette du passage permettant son désenclavement est celle acquise par prescription trentenaire, même si elle est située sur des fonds non issus de la division.

Aux termes de l’article 684 du Code civil :

« Si l’enclave résulte de la division d’un fonds par suite d’une vente, d’un échange, d’un partage ou de tout autre contrat, le passage ne peut être demandé que sur les terrains qui ont fait l’objet de ces actes.

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29
Oct

Les remontées mécaniques de la Sambuy seront bel et bien démontées !

Par ordonnance du 23 août 2025, le juge des référés du Tribunal administratif de GRENOBLE a rejeté la requête de l’association « Tous ensemble pour la Sambuy » ainsi que de plusieurs particuliers tendant à la suspension du marché conclu entre la commune de FAVERGES-SEYTHENEX et la Société TPC Maintenance SAS pour le démantèlement des remontées mécaniques du site de la Sambuy.

En effet, le juge des référés a considéré que l’association requérante ayant pour objet de « promouvoir les sites touristiques de la station de la Sambuy » et « d’entreprendre toutes actions pour lutter contre une mise à l’abandon ses sites de touristiques de la station de la Sambuy » n’avait pas d’intérêt lui donnant qualité pour contester le marché de travaux litigieux lequel a simplement pour effet de démanteler des remontées mécaniques.

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27
Oct

Attention à la tardiveté d’un retrait d’autorisation d’urbanisme !

La date de référence d’un retrait de permis est la première présentation du pli à l’adresse de l’intéressé !

Les dispositions de l’article L. 424-5 du Code de l’Urbanisme prévoient classiquement un permis de construire ou une décision de non-opposition à déclaration préalable peut être légalement retiré que pour autant que l’acte soit illégal et que le retrait soit exercé dans un délai légal de trois mois.

Sur ce point du délai, et par une décision intervenue le 18 juillet 2025 (n° 497128), le Conseil d’Etat fixe deux précisions importantes : d’abord, le retrait doit être notifié par lettre recommandée avec demande d’avis de réception postal, faisant application des dispositions de l’article R. 424-10 du Code de l’Urbanisme intéressant les décisions de rejet. Ensuite, le bénéficiaire est regardé comme ayant reçu valablement notification de la décision à la date de la première présentation du courrier par lequel elle lui est adressée.

Il s’agit donc de la même date de référence que celle jusque-là retenue pour la notification des décisions de rejet ou de sursis à statuer (voir en ce sens : CE, 24-05-2024 : n° 472321).

La Haute Juridiction écarte toute prise en compte de la date d’expédition, ainsi que la date de remise effective du pli à son destinataire.

Elle précise également que la charge de la preuve de cette première présentation revient à l’administration, en cas de contestation par l’ex-pétitionnaire de l’observation du délai de retrait.

Référence : Conseil d’Etat 18 juillet 2025 n° 497128

24
Oct

Permis de construire et fraude

Dans cette affaire, le Conseil d’Etat se positionne sur la notion de fraude tout en rappelant l’obligation de respecter la procédure contradictoire de retrait, obligation qu’elle a pourtant écartée dans un arrêt du 19 août 2025 n° 496157.

Dans cette affaire, le Conseil d’Etat considère que le Tribunal Administratif de GRENOBLE avait commis une erreur de droit en écartant la fraude alors qu’il résultait des faits de l’espèce établis par le Juge pénal qu’était caractérisée la volonté de la société pétitionnaire d’induire en erreur l’administration s’agissant de l’accord des propriétaires concernés pour leur partie privative par les travaux.

« 7. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que la décision de retrait contestée est motivée par le fait qu’en dissimulant qu’elle n’avait pas obtenu l’autorisation des autres copropriétaires pour des travaux qui affectaient leurs parties privatives, la société DC ne pouvait ignorer qu’à la date du dépôt de sa demande, elle ne disposait pas d’une des qualités prévues à l’article R.423-1 du Code de l’Urbanisme. Il ressort par ailleurs des constatations établies par l’arrêt du 4 octobre 2023 de la cour d’appel de Chambéry, condamnant la société CD et M. A, son gérant, pour obtention frauduleuse de document administratif, qu’en signant la demande de permis de construire ey en attestant avoir qualité pour demander l’autorisation d’urbanisme, ils ont sciemment prétendu avoir l’autorisation de l’ensemble des propriétaires afin d’obtenir de façon indue le permis de construire sollicité. ».

Cependant, le Conseil d’Etat valide la position du Tribunal Administratif de GRENOBLE qui avait considéré que le retrait du permis de construire pour fraude était illégal pour méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure considérant :

« 9. Toutefois, en second lieu, aux termes de l’article L. 122-1 du code des relations entre le public et l’administration : « Les décisions mentionnées à l’article L. 211-2 n’interviennent qu’après que la personne intéressée a été mise à même de présenter des observations écrites et, le cas échéant, sur sa demande, des observations orales () / L’administration n’est pas tenue de satisfaire les demandes d’audition abusives, notamment par leur nombre ou leur caractère répétitif ou systématique ». Selon l’article L. 211-2 du même code :« Les personnes physiques ou morales ont le droit d’être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / () 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits () ». La décision portant retrait d’un permis de construire est au nombre de celles qui doivent être motivées en application de l’article L. 211-2 du code des relations entre le public et l’administration. Elle doit, par suite, être précédée d’une procédure contradictoire, permettant au titulaire du permis de construire d’être informé de la mesure qu’il est envisagé de prendre, ainsi que des motifs sur lesquels elle se fonde, et de bénéficier d’un délai suffisant pour présenter ses observations. Les dispositions précitées font également obligation à l’autorité administrative de faire droit, en principe, aux demandes d’audition formées par les personnes intéressées en vue de présenter des observations orales, alors même qu’elles auraient déjà présenté des observations écrites. Ce n’est que dans le cas où une telle demande revêtirait un caractère abusif qu’elle peut être écartée.

10. Le respect du caractère contradictoire de la procédure prévue par les articles L. 121-1 et suivants du code des relations entre le public et l’administration constitue une garantie pour le titulaire du permis de construire que l’autorité administrative entend rapporter. Eu égard à la nature et aux effets d’un tel retrait, l’autorité administrative est tenue, y compris en cas de fraude, de mettre en œuvre la procédure contradictoire préalable à cette décision de retrait.

11. Il s’ensuit que c’est sans erreur de droit ni dénaturation que le tribunal administratif, qui a suffisamment motivé son jugement sur ce point, a accueilli le moyen tiré de la méconnaissance du caractère contradictoire de la procédure, au motif que la Commune n’a pas fait droit à la demande de présentation d’observations orales formulée par la société DC, en sus de ses observations écrites, dans le cadre de la procédure de retrait pour fraude du permis de construire qui lui a été délivré. Ce motif justifie à lui seul qu’il soit fait droit aux conclusions présentées devant le tribunal administratif par la société DC. Il suit de là que la société Cocimes n’est pas fondée à demander l’annulation du jugement qu’elle attaque. ».

Référence : Conseil d’Etat 19 août 2025 n° 496157